A l'abbé Corignet.
portrait de l'abbé clic

20 juillet 1910

Vous dire mon chagrin, à quoi bon ? Vous savez que depuis la seconde vous avez été mon guide précieux, mon meilleur ami. Vous savez que rien qu'à vous voir, à vous parler, les sombres pensées dont ma tête fut si souvent pleine, s'en allaient d'elles-mêmes et mes meilleures raisons de courage et d'énergie je les trouvais en vous. Et de combien d'autres bienfaits, je ne parle pas des matériels, Dieu les sait, ne vous suis-je pas redevable ? Que de fois je suis rentré au presbytère en songeant : " Je le verrai, je lui causerai et tout mon chagrin s'en ira." Quand je partis pour Paris, voici deux ans passés, le Supérieur me dit : " Ecrivez le plus souvent que vous pourrez à M.Corignet, restez toujours en relation avec lui; c'est un guide sûr sur lequel vous pouvez compter." Oui, je vous écrirai fidèlement tant que l'un de nous ne sera pas mort et que vous ne me direz pas , vous aussi : "assez, vos lettres me font mal". Mais, que le presbytère de Groix me semblera sombre et vide, maintenant que la lumière de ma vie s'en est allée de lui!

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Pardonnez-moi, vous aussi, à cette heure où vous vous en allez, toutes les peines connues ou inconnues que si souvent, je vous ai causées. Vous m'avez mené jusqu'aux portes du sanctuaire, mais les degrés se sont dérobés sous mes pas. Qu'importe, votre oeuvre est faite, et le mérite acquis devant Dieu. Je lui demande, chaque jour, cette chose unique : que vous n'ayez jamais à rougir de moi...

 

LETTRES

A M. René Le Roux.

En campagne, le 28 Novembre 1915

Cher ami,

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Gelées, glaces, neige, les fourriers de l'hiver nous visitent. Il fait bien froid dans les gourbis, malgré que nous les enfumions méthodiquement. Enfin on a touché sur et sous-vêtements d'hiver, et les poilus n'ont pas besoin qu'on leur envoie du courage de l'arrière. Ils en ont. Belle race, nos Bretons. Ce sera un livre splendide, celui qui racontera leur guerre. Si nous en revenons, il n'y aura plus de misère pour nous abattre, car nous les aurons connues, et domptées - toutes.

Kenavo. Et bonne santé ........ J'écrirai à Vallée le mois prochain. Ce soir il faut que je dorme un peu.

 

D'oh a greis kalon e Doue ha Breiz

BLEIMOR

A M. Achille Colin

31 janvier 1916

 

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Certes, il faudra, après la guerre, faire quelque chose pour la Bretagne et sa langue.
Si je dois mourir dans mes bottes, ici ou là avant la fin, l'un de mes plus grands chagrins, en mourant, sera de ne pouvoir donner mon effort avec les autres, sous le drapeau breton. Mais que la volonté de Dieu s'accomplisse. Il n'a besoin de personne pour mettre la Bretagne debout.
Mais l'heure passe, et j'ai des revues à passer à ma section.

CALLOC'H

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A l'abbé Corignet.

pages 2 et 3

Lettre adressée à l'abbé 1ère et dernière pages 2è et 3è pages